Le PNR de la Haute vallée de Chevreuse pourra-t-il relever les défis de sa charte ?

Le périmètre du plus ancien parc naturel régional d’Ile-de-France a été élargi à 51 communes sur deux départements. La plupart des objectifs de protection fixés depuis sa création ont été atteints mais des menaces pèsent avec les projets d’urbanisation du plateau de Saclay.

Créé en 1985, le Parc naturel régional (PNR) de la Haute vallée de Chevreuse, dans l’Essonne et les Yvelines, est accessible par le RER B. C’est le premier des PNR en Ile-de-France. Dans un contexte de très forte pression urbaine, il a été conçuPNR_chateau_madeleine comme un contrepoids indispensable à la ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines. C’était, avec 21 communes signataires de la charte du parc, le plus petit de tous les PNR. La révision de la charte, entrée en vigueur en novembre 2011, triple presque le nombre de communes qui passe à 51. 

Huit communes de l’Essonne se sont jointes aux communes des Yvelines du nouveau parc bordé au nord par la communauté d’agglomération de Saint­-Quentin-en-Yvelines (150 000 habitants) et à l’est par l’Opération d’intérêt national (OIN) du plateau de Saclay.

Maîtrise de l’urbanisation, amélioration de la qualité des eaux, mise en valeur des paysages constituaient les objectifs principaux de la première charte. A partir de 1999, la seconde charte avait élargi la sphère d’intervention du Parc à de nouveaux secteurs : politique de développement économique, diversification du tissu social, soutien au commerce et à l’agriculture de proximité, éducation à l’environnement, tourisme vert.

En 2007, le conseil régional d’Ile-de-France a engagé la troisième mise en révision de la charte. L’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région a souligné l’unité territoriale de ce grand ensemble.

Elle tient à sa configuration en château d’eau d’où s’écoulent la plupart des cours d’eau du sud-ouest francilien. Egalement à l’omniprésence de la forêt, ainsi qu’à celle des vallées qui recèlent une très riche biodiversité, à la présence de grands plateaux agricoles, au bâti traditionnel des villages et des grandes fermes.

La nouvelle charte affiche de grandes. ambitions, en particulier en matière d’urbanisme, d’aménagement du territoire et de lutte contre les changements climatiques.

En matière d’urbanisme, la charte promeut une politique de densification à l’intérieur des enveloppes urbaines avec un encadrement serré des zonages urbains pour limiter au maximum la consommation d’espaces naturels et agricoles.PNR_grande_ferme

Les associations s’interrogent sur la capacité du syndicat mixte du Parc à promouvoir largement des formes architecturales nouvelles adaptées et à persuader les habitants de leur nécessité. Elles sont prêtes à prendre leur part dans cette promotion. Le taux de progression de la population a été fixé à 0,55 ! par an, ce qui est le taux de croissance des Yvelines dans les dix dernières années (0,7 ! par an pour l’Ile-de-France).

Mais l’Etat a fait inscrire des objectifs plus élevés de construction de logements et les associations se sont interrogées sur la compatibilité entre les exigences de l’Etat et le taux fixé par le Parc.

En matière d’aménagement du territoire, la charte a pris en compte les réflexions du Sdrif sur un développement polarisé. Ainsi les villes de Gif-sur-Yvette, Les Essarts-le-Roi et Le Perray­ en-Yvelines sont considérées comme des pôles de développement en raison de leur desserte multimodale.

Des associations vigilantes

Les associations devront rester très vigi­lantes pour s’assurer que la croissance urbaine soit conciliable avec les enjeux paysagers et environnementaux comme les continuités écologiques. Mais elles sont très circonspectes sur la faisabilité d’un projet de territoire véritablement efficace en terme de lutte contre les changements climatiques. Le Parc est très mal desservi en transports en commun, sujet sur lequel il a peu de pouvoir, et de surcroît il va être exposé à une augmen­tation sérieuse du trafic pendulaire du fait de l’OIN de Saclay.

Car l’OIN de Saclay fait peser de graves menaces sur le Parc. L’Etat a annexé dans l’OIN trois communes du Parc : Châ­teaufort, Magny-Les-Hameaux et Gif-sur-Yvette (le plateau du Moulon a cependant été retiré du périmètre du Parc).

Lors de la révision de la charte, l’Union des amis du Parc avait distribué en sep­tembre 2008 à tous les élus du futur nouveau Parc un document soulignant le conflit des normes à l’intérieur du territoire entre un Parc et un OIN qui sont des outils administratifs d’aménagement du territoire répondant à des logiques administratives diamétralement oppo­sées, inconciliables et incompatibles.

Un OIN est totalement dérogatoire aux dispositions qui s’appliquent sur un territoire, les permis de construire sont du domaine du préfet. Qui va l’emporter sur le territoire du Parc dans les com­munes ayant la double appartenance, l’OIN ou la charte ?

Malgré toutes les incertitudes, il reste que, en étant un outil de préservation des terres agricoles et de lutte contre l’érosion de la biodiversité, le Parc naturel régional de la Haute vallée de Chevreuse peut jouer un rôle capital de grande infrastructure écologique pour un développement équilibré de l’Ouest parisien.

Catherine Reinaud

Présidente d’honneur de l’Union des amis du PNR de la Haute Vallée de Chevreuse

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Une extension chaotique en Essonne

L’arrivée de communes essonniennes dans un PNR historiquement ancré dans le dépar­tement des Yvelines n’a pas été facile. Elle a même failli remettre en cause l’existence du premier PNR d’Ile-de-France. Tout commence en juillet 2005. Le parc doit mettre en révision sa charte et engager une réflexion sur son extension. Avec seulement 2l communes (contre 99 par exemple dans le parc du Vexin), il sait qu’il n’obtiendra pas le renouvellement de son classement sans un agrandissement conséquent. La commune de Janvry, qui lorgnait sur cette opportunité depuis de nombreuses années, sera la première commune de l’Essonne à délibérer pour demander son rattachement au péri­mètre d’étude. Un an après, sous la pression des associations, 13 autres communes du département délibèrent pour faire partie du nouveau périmètre. En février 2007, l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région Ile-de-France (IAURIF) publie une carte qui sera annexée au document préparatoire du Sdrif. Sur la base d’une étude patrimoniale, 37 communes des Yvelines et 17 communes de l’Essonne sont pressenties pour faire partie du périmètre d’extension.

Cette publication provoque une réaction immédiate des élus du Parc qui demandent à la Région de ne garder que 17 à 18 communes des Yvelines. Mais côté Essonne, la volonté d’intégrer ce parc, considéré par certains comme “une réserve d’Indiens”, ne fait pas l’unanimité non plus. A chaque échéance électorale (législatives en 2007, municipales et cantonales en 2008 puis régio­nales en 2010) l’extension du parc en Essonne est au centre des débats politiques. De rebondissement en rebondissement (le dernier étant le report de la décision du Conseil général de l’Essonne qui a encore retardé la procédure), le Parc a fini par perdre son classement qui expirait en janvier 2011. Il le retrouve le 5 novembre 201 I, avec un décret fixant son périmètre définitif à 5l communes. Toutefois, sur les 17 communes initialement pressenties par I’I AU RI R seules 8 communes de l’Essonne (I) ont décidé de rejoindre le parc. En mai 2012, la commune de Dourdan est devenue “ville porte” du parc. D’autres communes (2) qui avaient été incluses puis écartées du périmètre d’étude en 2008 ont acquis un statut de “communes associées” et pourraient rejoindre le Parc lors de la prochaine révision de sa charte.

Catherine Giobellina

Présidente de l’Union des amis du PNR de la Haute Vallée de Chevreuse  

(1) Forges-les-Bains, Saint-Jean-de-Beauregard, Courson-Monteloup, Gometz-fa-Ville, Fontenay-lès-Briis, Janvry, Boullay-les-Troux el Gif-sur-Yvette.

(2) Gometz-le-Châtel, Bures-sur-Yvette, Saint-Chéron, Corbreuse, Les Granges-le-Roi, Sermaise, Roinville.

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